Dumont (1889)

De Arbres
  • Dumont Arsène. 1889. 'Essai sur la natalité dans le canton de Paimpol (Côtes-du-Nord)', Bulletins de la Société d'anthropologie de Paris, III° Série. Tome 12, 273-315 texte.


L'auteur étudie la nuptialité, la natalité et le solde migratoire du canton de Paimpol au XIXe (qui est pas encore fini).
L'article est très dense et, pour ce qui concerne les chiffres, très documenté et analysé. Sa principale conlusion est que la baisse de la natalité y est corrélée avec une baisse de la nuptialité dans les communes les plus aisées, par résistance à la division du patrimoine lors de l'explosion démographique, et par influence religieuse.


 Extrait de la conclusion, p. 313:
 "dans le canton de Paimpol, la fécondité nuptiale reste considérable ou fléchit à peine ; c'est la nuptialité qui diminue. Ces cultivateurs aisés, qui se privent de tous rapports sexuels jusqu'à quarante ans et parfois toute leur vie, montrent, par cette crainte exagérée de l'amour et de ses suites, l'influence que l'enseignement ecclésiastique a prise sur eux. Ils la montrent encore mieux en ayant, une fois mariés, autant d'enfants que leur âge et la nature le permettent. Plus les mariages sont rares, plus la fécondité nuptiale est considérable (Kerfot)."


L'auteur décèle une immigration des communes intérieures vers des communes pauvres mais maritimes du département des Côtes-du-Nord.

 extrait, p. 286:
 "[A Plouezec, ] Pendant la période […] de 1800 à 1831, le chiffre de la population a passé de 2 809 à 4 138 habitants, en progrès de 1 329. L'immigration dépassait donc de 595 le chiffre inconnu des émigrants. En somme, durant ces trente années, Plouezec présente une natalité très forte, une nuptialité au-dessus de la moyenne française, une fécondité bonne, une mortalité élevée, enfin une population rapidement croissante, chez laquelle le grand nombre des naissances n'empêche point une immigration considérable. Le sol de Plouezec étant mediocre et, dès cette époque, très suffisamment peuplé, il faut attribuer cet afflux de population étrangère à l'attrait que la vie maritime exerce sur les populations pauvres de l'intérieur. J'ai déjà constaté ce phénomène dans les deux communes pauvres et maritimes de Trélevern et Trévou-Tréguignec, dans le canton de Perros."


Plus loin, l'auteur constate le même solde migratoire positif à Kerity.


Les ménages peuvent être couramment tenus par des fratries.

 p. 306:
 "A Plounez, à Kerfot surtout, un grand nombre de ménages sont composés de trois, quatre ou cinq frères et sœurs cultivant ensemble un petit bien de 1 000 à 1 400 francs de revenu et vieillissant sans songer au mariage. Ils redoutent un changement de condition, prétextent la crainte de ne plus pouvoir vivre chez eux et d'être obligés d'aller travailler à la journée chez les autres. […] Parfois il arrive que le plus jeune de la famille, au retour du service militaire, émancipé par l'air du dehors, signifie à ses frères et sœurs sa résolution de se marier. Cela jette la consternation dans le ménage ; c'est la division inévitable du patrimoine, le désarroi de l'association, la dispersion de ses membres. Alors chacun doit songer à soi, se créer un nouveau foyer, et il n'est pas rare de voir les quatre ou cinq frères et sœurs contracter mariage le même jour par économie, alors que les aînés ont la quarantaine ou même la dépassent."


Est mentionné p.312 à Plounez un phénomène de célibat tardif pour la partie aisée du bourg. Les mariages sont "le plus souvent vers 35 ou 40 ans pour les hommes, vers 30 ou 35 ans pour les femmes".


Il est fait mention(, et c'est rare), de l'émigration féminine.

 p.308.
 "[à Plouezec, ] comme dans le canton de Perros, un certain nombre de jeunes filles vont se placer à Paris en qualité d'infirmières à la Salpêtrière, à l'hôpital Trousseau. Celles qui ont eu un enfant, quittent également le pays et trouvent à se louer comme nourrices à Paris ou à Jersey."
 p.310:
 "[à Ploubazlanec,] Les jeunes filles mères quittent ordipairement le pays et trouvent à se placer comme nourrices à Paris."
 p. 312:
 "[à Plounez, ] L'émigration se compose de fils de manouvriers, qui, leur service militaire terminé, restent dans les villes comme domestiques, cochers, commis, hommes d'équipe dans les chemins de fer. Un certain nombre de jeunes filles se placent comme bonnes à Paris. « Ce ne sont pas les meilleures », me dit-on, soit qu'elles aient eu un enfant, soit que la légèreté de leur conduite leur ait attiré les sévérités de l'opinion. Parfois, elles reviennent grosses. Les quelques naissances naturelles que l'on constate proviendraient de cette source."