Bes-, be-, bi-

De Arbres
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Le préfixe bes-, be- ou bi- 'deux' est parfois comparable au français vice- dans le sens 'un de moins'. Son sens semble être troublé par un soutien par des emprunts au bis- français de biscuit dans le sens de 'deux fois'.


(1) ar plac'h yaounak a zalc'he an nor evit beskornañ ar bilhedoù dre ma teue an dud
le fille jeune R1 gardait le porte pour pfx.corner le billet.s par que4 venait le 1gens
'la jeune fille qui gardait la porte pour écorner les billets comme les gens entraient'
Standard, Herri (1982:40)


Kervella (1947:§877) donne belost, et biskorn, bigofek, bigorn, biouell, bizourc'h, bizeost, bisac'h.

Cornillet (2020) donne besroue 'vice-roi', et beskorn 'vache écornée, qui n'a qu'une corne' ou 'épissoir (outil en forme de corne sevrant à écarter les torons d'une corde)'.


Morphologie

dévoisement

Le préfixe bes- peut provoquer un dévoisement sur sa racine, comme sur den dans béstenn 'celui qui n'est ni d'une paroisse ni d'une autre' (Saint-Nicodème, Ernault 1879-1880:149).

Sémantique

'un en dessous', 'un en deça'

En préfixe de nom de rang ou de statut, le préfixe bes- obtient le grade en dessous (cf. le français sous-): besroue, beskont, besrener, Kervella (1947:§877). Ce préfixe est alors à comparer avec le préfixe eil- 'sous-'.

Goyat (2012:333) donne /bi'lostiɡ/ 'croupière', qui est la partie du harnais d'un cheval qui passe sous sa queue.

Le Roux (1915:90) propose de former sur belost, bilost 'pénultième' (Le Gonidec 1821:141) le composé ragbilost 'antépénultième'.


'petitesse'

Le Bayon (1878:15) donne, avec le sens de "petit, part. diminutive": bihan̄, bian̄ 'petit, bref', bigorn 'petite corne, coquille du genre sabot', bilost 'tronçon de queue', bihouil 'levain' (<gouil).

idée de doublement

En trégorrois de Perros-Guirec, Konan (2017) donne bikorbi et le plus standard bikorbell pour le nom de la pince à boucler le groin des porcs. Dans cet usage, bi- est tout à fait semblable au préfixe bi(s)- roman présent dans le français bicyclette.

L'usage du préfixe bes- pour traduire bègue est bien établi. Kervella (1947:§877), Goyat (2012:333) donnent besteod 'bègue' (cf. Fagon & Riou 2015:'bestiaod').


(2) Ral kaoud meried bestiaod avase.
rare avoir femme.s pfx.langue comme ça
'C'est rare de trouver des filles bègues comme ça.'
Cornouaillais (Sein), Fagon & Riou (2015:'bestiaod')


(3) Ha paouez besteodiñ, tribledie !
et cesse double.langu.er triple.Dieu
'Et cesse de zézayer, nom de diable !'
Standard, An Here (2003:51)

Diachronie et horizons comparatifs

Selon Deshayes (2003:36), le préfixe bes- vient de l'ancien français vice-, par renforcement de la consonne initiale. C'est plausible pour le sens de sous-grade. Ce préfixe emprunté a aussi pu renforcer un préfixe celtique plus ancien.

L'idée de doublement correspond au préfixe roman bi-.

En gallo, Auffray (2007:intro) donne, correspondant au français bis-, le préfixe be(r)-, be(z)-, bi(z)- illustré par belinge, berlinge 'étoffe grossière', bezègr, bizègr 'aigre, aigrelet'.


À ne pas confondre

Malgorn (1909), à Ouessant, donne bigour 'grincement aigu', allomorphe du standard gwigour.

Le préfixe ancien bu- '(de) boeuf' a aussi un allomorphe en be- dans bevin 'viande de boeuf, boeuf à viande'. Une initiale en be- peut aussi être la trace d'une composition en bern 'tas', comme dans bec'holo 'tas de paille, de foin, de bois'.