Avezard-Roger (2004a)

De Arbres
  • Avezard-­Roger, Cécile. 2004. Description syntaxique du syntagme verbal en breton: approche dynamique, thèse, Université René Descartes.


La thèse est basée sur un corpus oral recueilli auprès de 14 bretonnants natifs de zones régionales différentes : Duault en Centre Bretagne (Poher), la Forêt-Fouesnant dans le Finistère Sud et Saint-Pol-de-Léon au Nord-Ouest. Le protocole comprend des traductions, des phrases à choix multiples pour l'ordre des mots et, pour chaque locuteur, un petit corpus libre.

Les séances d'élicitation n'ont pas été dirigées pour obtenir des données négatives (phrases jugées agrammaticales par les locuteurs). L'auteure s'appuie sur ce qui n'est pas attesté en corpus pour appréhender les limites possibles des structures.

Il est évident que les données proviennent effectivement de locuteurs traditionnels, et les données sont faciles à utiliser car leur transcription et leur lieu de collecte sont le plus souvent précisés, mais avec grandes précautions car certaines transcriptions ou analyses même descriptives portent à caution.


errata

transcriptions

Quelques transcriptions surprenantes demanderaient confirmation ou sont clairement fausses:

p. 283 Debret eo ar bara, [debɛteaʁbaʁa] sans voisement avant voyelle ?
p.301 'Nous espérons que les marins n'auront pas trop de vent.' [esperãmrãmparmartəlodœtnunkœ'riavœl]
p. 332 'Ils ne dormaient pas', [ne buskeantʃet]
p. 340 la deuxième donnée est notée une fois avec une voyelle nasale, une fois sans.
p. 342 La traduction de 'Tu iras à la fête' est notée [ mõn aʁit d aʁ 'gwel ] /allé fait.FUT.2P à det fête/. Ne s'agit-il pas plutôt d'un temps morphologique présent avec un vouvoiement provoquant un sandhi (mont a rit d'ar gouel), ou bien un futur 2P en [ mõn aʁi ] avec un T surnuméraire (mont a ri d'ar gouel)?
p. 447, ce qui est transcrit comme [ dezã ] apparaît en dessous au féminin [ dezi ].
p. 448: e di ?
(2) [ gusi w ãn ɛt edi ma bʁœʁ ] ( est probablement [… ɛd eti ...])
après étais été en maison mon2 frère
'Après je suis allée chez mon frère.'
Breton central (Duault), Avezard-Roger (2004a:448)


p. 458, les deux transcriptions phonologiques de la deuxième donnée ne correspondent pas.

découpes morphologiques

Quelques découpes morphologiques montrent une méconnaissance des phénomènes phonologiques en bord de mots. A-t-il été demandé aux locuteurs de dire les mots en isolation ?

p. 202 [memøsXwaXedabʁezõnɛkynpjɛs] est découpé [XwaXe da bʁezõnɛk] et glosé /joué en breton/, alors que le /d/ appartient au participe voisé devant voyelle, dans Me meus c'hoariet e brezhoneg une pièce. Il s'agit probablement d'un passage au français 'une pièce' en dislocation à droite. La voyelle /a/ de [a bʁezõnɛk] est aussi ici étonnante, et serait à recouper.
p. 244 [ɛr'moredjɛndabɛs'ketamory] glosé /dans la mer va P6 pour pêcher morue/ est plus probablement /dans la mer allé étaient pour pêcher morue/, Er mor aet oant da besketa morue.
p. 245, 285 [amivepakɛdɛgozɛalbrezonɛk] glosé /celui attrapé à parler breton/ est plus probablement /celui était attrapé à parler breton/, An hini ve(ze) paket o kaozeal brezhoneg...
p. 316 'Dès que nous pourrons, nous irons les voir.', [djysty'hallœmhemtevilnɛ] est découpé en [hemt e vil nɛ] glosé /irons à voir P6/ alors qu'il s'agit d'un sandhi … ez imp da welout anezhe
p. 337, [ kapkenamahɛlõmpetehɔmpdavelutanezo ] et non [daveludanezo ] ? De plus, [ kapkenamahɛlõmp] est découpé en [ kapkena ma hɛlõmp ] glosé /dès.que quand peut.FUT.P4/, ce qui est plus probablement [ kap ken a ma hɛlõmp ], kap ken ha ma c'hellomp, /capable tant que que pouvons.(présent)/.
p. 354 [dəzigelo] 'de ses nouvelles' est découpé en [də zi gelo], zi étant le possesseur. ([dəz i gelo], deus e geloù)
p. 452, [dɛn nav ɔʁ] glosé /à/def neuf heures/ est da nav eur, sans article.
p. 452, dans [vid u deabla petʁam evid u gwil], les articles sont des indéfinis singuliers, evit un deiz-ha-bloaz peotramant evit ur gouel, et non des définis pluriels.


interprétations, mises en perspectives

Il existe ça et là quelques signes de méconnaissance globale de la langue.

p. 248, est présentée l'alternance a/e des rannigs à partir d'exemples de Duault où justement cette distinction a été perdue puisque dans les deux exemples présentés, le rannig provoque une lénition sur le verbe.
p. 292, un sujet prénégation déclenchant l'accord riche est traité comme une irrégularité de La Forêt-Fouesnant alors que c'est la règle standard.
p. 337. L'analyse de la donnée (5) supposerait qu'à Duault, un morphème [ pju ] peut réaliser le complémenteur de temps (équivalent standard pa), mont gant signifier 'aller dans', et l'article devant ti être absent de la représentation au point que la préposition gant puisse avoir un T final prononcé. (> 'j'étais allée avec qui ?')
(5) [ a pju wɑ̃n et gãnt ti ]
et quand1 étais all.é avec maison
'Et quand je suis allée à la maison… '
Breton central (Duault), Avezard-Roger (2004a:337)


p. 395, [aʁ baʁuz vaʁvɛʁ] est traduit 'La commune meurt' (cf. Er barrez e varver, 'On meurt dans la commune.').
p. 419, des pronoms objets incorporés dans une préposition (type anezhi) sont relevés à saint-Pol-de-Léon comme représentatifs de la langue alors que ces ordres de mots sont exceptionnels, et agrammaticaux ailleurs.
p. 424, [mɛ msXwan vɔn gustəd ] est glosé /P1 a envie/P1 de dormir/, avec une traduction explicite de [ vɔn ] en l'élément "fonctionnel" 'de' (est-ce une influence sur l'auteur de l'allemand von?). Il s'agit de Me meus c'hoant (da) vont (da) gousket, avec une lénition révélant la présence des deux prépositions da. La transcription du verbe infinitif kousket est aussi étonnante dans ses deux consonnes finales.
p. 431, [sehãʁulgaivam], 'Alors, il demande à sa mère.' est plus probablement avec une nasale [sehãʁulgaivãm]. L'initiale [sehã], setu eñ… , a été glosé /là P3m/, confondant ze, aze 'là' et setu 'voici, alors'.
p. 432, [nãn] glosé / non / [?] est la forme de unan.


donnée à croiser

En (1), une négation préverbale apparaît au-dessus du pronom sujet me qui déclenche l'accord pauvre sur le verbe gouzout 'savoir' (cf. Me ne ouzon ket kalz gwriat mui gant ma daouarn).


(1) [ a ne me u ke kal gʁuwi majn ga ma duən ]
Ha ne me oar ket kalz gwriat mui gant ma daouarn.
et ne1 moi sait pas beaucoup coudre plus avec mon deux.main
'Et je ne sais plus coudre du tout avec mes mains.'
Cornouaillais (La Forêt-Fouesnant), Avezard-Roger (2004a:455)