Différences entre les versions de « Accentuation »

De Arbres
m (a déplacé Accentuation vers Accentuation de mot)
m (a déplacé Accentuation de mot vers Accentuation en écrasant sa redirection)
(Aucune différence)

Version du 24 décembre 2013 à 14:35

L'accentuation est un pôle important d'information prosodique.


L'accentuation de phrase joue un rôle important dans la structure informationnelle d'une phrase.

La langue bretonne a aussi une accentuation de mot, un système d'accentuation tonique.

L'accent tonique est une unité phonologique supra-segmentale: il ne peut pas être prononcé en isolation, sans la présence d'au moins un phonème segmental.


Accentuation de phrase

Gros note l'importance de l'accentuation, même s'il ne dégage pas les effets produits par l'accentuation elle-même des effets pragmatiques induits par une structure informationnelle particulière.

 Gros (1984:138)
 Soit la phrase da beleh ez?, avec l'accent tonique à sa place normale sur ez.
 Elle signifie tout simplement 'Où vas-tu?' (question banale)
 
 Mais prononcez-la: Da beleh ez?, en accentuant très fortement la syllabe be 
 et en mettant l'accent secondaire sur ez, le sens est changé.
 La question est maintenant chargée d'affectivité. Elle dénote chez le sujet parlant 
 un sentiment de désapprobation, d'impatience ou de colère que la phrase écrite est 
 incapable de rendre.
 
 De même dans l'exemple Deui ket amañ?.
 Si on le prononce lentement sur un ton neutre, égal, avec l'accent principal sur deu, c'est
 une interrogation purement intellectuelle: 'Ne viendras-tu pas ici?'
 
 Mais si on prononce Deui ket amañ? rapidement, en accentuant plus fortement le 'a' de amañ 
 que la syllabe deu, il ne s'agit plus d'une question, mais d'un ordre formulé avec impatience 
 et correspondant au français 'Veux-tu venir ici!'

Selon Goyat (2012:128-9), l'accentuation de phrase est liée à la structure informationnelle.

 Goyat (2012:128-9):
 L’accent de phrase nous semble lié à la structure informationnelle. L’unité de la structure
 informationnelle est le groupe de souffle, encore appelé unité d’intonation. La structure
 informationnelle dépend de la place de l’accent de groupe dans cette unité.
 En breton, cet accent est souvent placé dans le segment initial, qui est alors le segment
 focalisé.
 Exemple : 
 /'ɡɥi:n nef ke ˌmorse/ 
 Gwin n’ev ket morse. 
 'Du vin, il n’en boit jamais.'
 
 L’accent de groupe est aussi souvent placé dans le segment final, et c’est alors le segment
 focalisé.
 Exemple : 
 /pøs ki:nˌɡul ɡa 'pɛ:r/ 
 N’ho-peus ken goulenn gand Per. 
 'Vous n’avez / tu n’as qu’à demander à Pierre.'
 
 Mais ce n’est bien sûr pas nécessairement la dernière syllabe du groupe qui porte l’accent :
 Exemple : 
 /me ɡav ˌma:d ãn a'va:lu se/ 
 Me a gav mad an avalou-se. 
 'J’aime bien ces pommes.'
 
 Tout se passe donc, dans la conscience du sujet parlant, comme si la fin de phrase était
 prévue. La place du dernier accent de groupe détermine celle des accents situés en amont dans
 la phrase. C’est un peu comme si le locuteur procédait inconsciemment à un compte à
 rebours.
 L’accent de groupe est plus rarement placé dans les segments intermédiaires ; du moins dans
 les phrases, en général courtes, de la conversation courante.

Accentuation de mot

mots composés

Hemon (1995:§274-275) note que dans les mots composés mettant côte-à-côte deux mots portant l'accent, c'est celui du premier qui s'efface ou s'amuise.

adverbes déictiques spatiaux

Les adverbes déictiques spaciaux -mañ, -se et -hont dérogent à cette règle car c'est leur accent qui disparaît en cas d'adjacence.

Par exemple, an dra-mañ, kement-se, mintin-mañ... sont accentués sur la base.


variation dialectale

Le système accentuel dans le domaine du mot est sujet à de conséquentes variations dialectales, la ligne de fracture la plus aisément repérable étant celle qui oppose les parlers du vannetais d'avec les autres (KLT et standard).


 Le Pipec (2000:88), sur le vannetais de Malguénac:
 
 "On a donc un système très différent et beaucoup plus complexe que celui 
 du breton retenu comme standard. La principale originalité du système 
 considéré est d'articuler deux accents indépendamment l'un par rapport à 
 l'autre:
 - Un accent fixe, frappant régulièrement la dernière syllabe, constitué 
 d'une longueur et d'une intensité principales, relayée dans les mots de 
 plus de deux syllabes par une intensité secondaire sur la syllabe initiale.
 - Un accent libre, celui appelé ici longueur secondaire, touchant 
 n'importe quelle syllabe.
 
 Le rôle distinctif de la longueur vocalique principale, ainsi que l'autonomie 
 de la longueur secondaire oblige à reconnaître à la durée vocalique un rôle 
 phonologique, et donc à la retenir comme trait pertinent (longueur 
 paradigmatique).
 Le système se sépare donc nettement en cela des parlers du nord-ouest, pour 
 lesquels la longueur est contingente puisque conditionnée par l'accentuation 
 et par le contexte phonémique de la syllabe (longueur syntagmatique).
 En revanche, on relèvera des traits communs avec les parlers de la zone à 
 accentuation initiale ou antépénultième.

Accentuation de groupe de mots

 Goyat (2012:127):
 Quand il s’achève par un monosyllabe, le groupe est accentué sur ce monosyllabe,
 sauf s’il est précédé de l’article indéfini, d’un numéral monosyllabique, de 
 l’interrogatif ped 'combien', de l’exclamatif pegen 'comme', des adverbes 
 re 'trop', ken 'aussi' et gwall 'très, ou des pronoms hini et re, quand ils 
 sont précédés d’un possessif ; c’est alors, à nouveau, l’avant-dernière syllabe du 
 groupe qui est accentuée.
(1) ['on ti] eun ti 'une maison'
[ãn 'tri den] an tri den 'les trois hommes'
[ãn 'dri den] an dri den 'le troisième homme'
[ãn 'ɛjl vɛrh] an eil verh 'la deuxième fille'
['ped den] Ped den ? 'Combien d’hommes ?'
['pet ti] Ped ti ? 'Combien de maisons ?'
[pe'ɡɛn zod ] Pegen zod ! 'Comme (c’est) stupide !'
['re vɛr] re verr 'trop court'
['ken dus] ken dous 'aussi doux'
['ɡwal vad ] gwall vad 'très bon' (dans des phrases négatives)
[ma 'hwi me] ma hini-me 'le mien'
[ ma 're me] ma re-me 'les miens ou les miennes' Plozévet, Goyat (2012:127)

Terminologie

En anglais, le terme pour 'accent tonique' est stress.

En breton, le terme est taol-mouezh.

Bibliographie

breton

  • Falc’hun, F. 1972. 'De la durée vocalique sous l’accent dans le breton de Saint-Pol-de-Léon', H. Pilch & J. Thurow, Indo-Celtica: Gedächtnisschrift für Alf Sommerfelt, Hueber, Munich.
  • Favereau, F. 1997. 'Overaccomodation, motherese, et déplacement de l’accent en breton scolaire', Teod-Teanga-Tafod 3 ( ?).
  • Madeg, M. 2010. Traité de prononciation du breton du Nord Ouest, Emgleo Breiz.
  • Pilch, Herbert. 1986. 'L'accentuation de la langue bretonne', La Bretagne Linguistique 2, CRBC.
  • Pipec (le), E. 2004b. Les schémas accentuels en breton du sud-est, Mémoire de DEA, Rennes : U.H.B.
  • Pipec (le), E. 2000. 'Le breton de Malguénac, Quelques aspects', Hor Yezh (éd.).
  • Plourin, Jean-Yves. 1985. 'L'accentuation en Haute-Cornouaille et en Bas-Vannetais', La Bretagne Linguistique 1, CRBC.

littérature théorique

  • Vergnaud, Jean-Roger & María Luisa Zubizarreta. 2005. 'Phrasal stress and Syntax', Martin Everaert And Henk Van Riemsdijk (éds.), The Blackwell Companion to Syntax, Blackwell Publishing, vol III, chap.49.