-ach, -aj

De Arbres

Le suffixe -ach, ou -aj, est un morphème nominalisant. C'est un emprunt d'origine romane qui obtient un nom massique à partir d'une racine adjectivale, verbale ou nominale.


Kervella (1947:§840) donne sklavach, bugaleach, skolach, luc'hach, koadach, moc'hach, evach, livach, liñvach, mogach.

Trépos (2001:75) donne meskaj, 'mélange'; evaj, 'boisson'.

Favereau (1997:§147) donne debraj, 'mangeaille', drogach, 'drogue', edaj, 'céréales (à déjeuner)', flikaj, 'flicaille', pestaj, 'peste (fig.)'.


Morphologie

composition

On retrouve le suffixe -ach, -aj en composition avec -enn dans les finales en -achenn.


exocentricité

Le morphème -ach, -aj est exocentrique; il obtient un nom quelle que soit la catégorie de sa base.


Sur une base adjectivale, -ach, -aj obtient un nom.

(1) dister, 'insignifiant' => disterach, 'babiole, chose futile', Merser (2009)


Il se trouve aussi directement sur un nom.


(2) Glavaj a ra arre.
pluie.sfx R fait encore
'Il mouille encore.' Vannetais, Herrieu (1994:96)


La base peut aussi être verbale.


(3) En ti-mañ a zo daou chomaj.
dans.le maison-ci R y.a deux rest-.sfx
'Dans cette maison-ci, il y a deux logements.' Trégorrois, Gros (1984:356)


formation sur base plurielle

Kervella (1947:§840) donne bugaleach.

Gros (1984:356) donne traouajou, /chose.s.sfx.s/, 'choses, nippes, affaires'.

genre

Les noms dérivés en -ach, -aj sont masculins (Kervella 1947:§840).

Favereau (1997:§147) note une apparition de formes féminines dans les cas où -aj se substitue à -iezh. Ce suffixe -iezh forme par ailleurs des noms féminins.

nombre

Les noms dérivés en -ach, -aj ont un pluriel en -où (Kervella 1947:§840), obtenant -ajoù ou -achoù.

Cependant, toutes les finales en -achoù ne sont pas forcément des pluriels dérivés de bases au singulier en -ach, -aj: il existe un suffixe -achoù qui est un marqueur hypocoristique qui peut former des singuliers (freskachoù, 'viande fraîche', Favereau 1997:§147) et n'a pas d'équivalent en -ach, -aj (diankachoù, pellachoù, lostennachoù, malachoù, stokachoù, bruzhunachoù, kouezhachoù, dislonkachoù, traoùachoù, Kervella 1947:§840).

Diachronie

Le suffixe -ach, -aj est un emprunt au suffixe français -age, qui a le même impact dépréciatif (Deshayes 2003:39).


Sémantique

Selon Kervella (1947:§840), le suffixe -ach, -aj dénote un état ou un regroupement.

lecture massique

Gros (1984:356) donne glizaj, glizataj, 'crachin' et priaj, 'de la poterie'.

Gros (1970b:§'avelaj') traduit avelaj par 'grand vent'.


(3) Pa veze bet avelaj evel-se e miz Here ez een d'ar hoajoù da geuneuta.
quand était eu vent.sfx comme-ça en mois octobre R allais à'le5 bois à1 petit.bois.ramasser
'Quand il y avait eu de grands coups de vent comme cela en octobre,
j'allais dans les bois ramasser du bois mort.' Gros (1970b:§'avelaj')


(4) E taoler houarnaj ken nend eo ur spont.
R jette.IMP fer tant ne est un honte
'On jette du fer que c'en est effrayant.' Le Scorff, Ar Borgn (2011:14)


La racine peut aussi être un nom abstrait (treitouraj, 'mauvais traitement', trubarderaj, 'duplicité', Favereau 1997:§147).


résultat d'une action

(2) Mouded a zo kignaj.
motte.s R est écorch-.age
'Les mottes sont de l'écorchage (croûte gazonnée).' Trégorrois, Gros (1984:356)

Favereau (1997:§147) donne hadachoù, 'semis', ou malachoù, 'choses moulues', stagachoù, 'ceinture(s) de sécurité', peurachoù, 'pâtures'.


impact parfois péjoratif

Vallée (1980:XVIII) compare et oppose les suffixes -iezh et -ach, -aj, le second étant "le plus souvent péjoratif" (belegiezh, 'prêtrise', vs. belegiach, non traduit). Kervella (1947:§840) aussi note qu'à ce suffixe est "souvent" attaché une lecture péjorative.


Gros (1984:355) considère que -aj "a un sens nettement péjoratif dans certains mots". Il donne evaj, 'piquette, jus de chaussettes, tisane, boisson imbuvable'; lonkaj, 'toutes sortes de liquides'; mohaj, 'cochonnerie'.


Gros (1984:356) note que les mots en -aj "marquant le résultat de l'action ou une collection" ne sont que "faiblement péjoratifs".


'-aj' vs. '-ø'

La dérivation en -aj peut être sujette à variation dialectale.


(2) E Lanngoad e vez greet strudaj euz ar struj.
à Langoat R est fait strudaj de le broussailles
'A Langoat on appelle les broussailles strudaj.' Trégorrois, Gros (1984:356)


emprunt

Dans certains cas d'emprunt, ce suffixe semble élu par ressemblance phonétique avec le nom source.


(1) Hag e chome e-giz-se div pe deir eur horolaj, ha den ebet war e dro.
et R restait comme.ça 2 ou1 3 heure horloge et personne aucune sur son1 tour
'Et il restait deux ou trois heures comme ça sans personne autour (sans que personne s'en occupe).'
Léon, Mellouet & Pennec (2004:79).

A ne pas confondre

Favereau (1997:§147) note que dans rodellajoù, 'spirales', il s'agit probablement d'une dérivation en -ad+-où.